Catherine Il suffit d'un Amour Tome 2 - Бенцони Жюльетта - Страница 19
- Предыдущая
- 19/112
- Следующая
— Qu'il vous faudrait encore passer par mon lit. Devrais-je vous rappeler que vous y avez dormi une grande nuit... dans mon lit, et qu'il ne vous est advenu aucun mal ?
— C'est vrai, Monseigneur et, je le confesse, sur le moment, je n'ai pas compris...
— C'etait pourtant bien simple. Ce soir-la, j'ai voulu mettre a l'epreuve votre... dirai-je, obeissance de fidele vassale ? Vous avez obei. Mais j'eusse ete le dernier des hommes si j'en avais lachement profite. Si je me suis montre brutal, c'est simplement parce que j'etais jaloux. Mais, mon c?ur, ce que je veux que vous sachiez bien, c'est que je ne vous contraindrai jamais.
C'est de vous, et de vous seule, que je veux vous tenir.
Il s'etait penche vers elle pour lui parler de plus pres. Son haleine chaude caressait la nuque inclinee. Dans la nuit qui les environnait, sa voix prenait une chaleur, un charme que Catherine ne lui avait encore jamais connus.
Elle sentait qu'a cet instant il etait sincere et elle se defendait mal contre le trouble que faisait naitre en elle la musique des mots d'amour murmures dans l'ombre. Pour secouer le charme, elle voulut rappeler sa rancune.
— Pourtant, ce marche que vous avez conclu avec Garin ?
— Quel marche ? demanda Philippe avec une nuance de hauteur involontaire. C'est la seconde fois que vous y faites allusion. Je n'ai passe aucun marche avec Garin de Brazey. Pour qui donc nous prenez-vous, l'un et l'autre ? J'ai ordonne a l'un de mes plus fideles serviteurs d'epouser une jeune fille admirablement belle et dont j'esperais parvenir a me faire aimer, mais cette esperance je ne lui en ai point fait confidence. Je le repete, j'ai ordonne. Et lui, en sujet de valeur, il a obei sans discuter. Voila tout ! Ai-je vraiment commis un crime en voulant que vous fussiez riche, noble, a la place qui vous convient ?
Catherine secoua la tete et frissonna. Ce dont Philippe s'autorisa pour entourer ses epaules d'un bras en pretextant qu'elle devait avoir froid. Elle ne protesta pas. Les yeux perdus dans le vague, sensible seulement a la pression de ce bras autour d'elle et incapable de retrouver trace de sa colere, elle murmura :
— Un sujet de valeur en effet... d'une fidelite a toute epreuve et qui, si vous ne lui avez rien demande, a du comprendre a demi-mot. Car, enfin, Monseigneur, en me donnant un mari, vous deviez supposer qu'il exercerait ses droits ? Pourtant, il n'en a rien fait. Il a meme toujours refuse farouchement de me toucher.
— Le lui avez-vous donc demande ?
Catherine tourna la tete vers lui pour tenter de
scruter ce visage d'ombre. Le defi sonna dans sa voix.
— Je me suis offerte a lui, un soir. Offerte dans des conditions telles qu'aucun homme n'aurait resiste. Il a failli succomber mais il s'est repris en disant que c'etait impossible, qu'il n'avait pas le droit de me toucher. Vous voyez bien qu'il me considere comme vous appartenant.
Elle avait senti, avec une joie mechante, le bras de Philippe se crisper autour de ses epaules, mais il n'y avait aucune colere dans sa voix quand il repliqua :
— Je vous l'ai dit, jamais ce sujet n'a ete evoque entre lui et moi. Et peut-
etre ne pensait-il pas a moi en prononcant ces paroles.
— A quoi alors ? Ou a qui ?
Philippe ne repondit pas tout de suite. Il reflechissait peut-etre. Enfin, il dit brievement :
— Je ne sais pas !
Un silence tomba entre eux. Au fond de la campagne, un chien aboya, une chouette hulula, mais cela ne diminua pas l'impression de Catherine qu'elle et le duc etaient pour le moment seuls au monde. Il etait tout contre elle maintenant, la tenant appuyee contre sa poitrine.
Il l'avait, tout en parlant, enveloppee de ses deux bras et, instinctivement, elle avait appuye sa tete sur l'epaule du prince. Cet instant etait doux et Catherine en avait momentanement assez des combats steriles. Puisque Arnaud l'oubliait dans les bras d'une autre, pourquoi refuserait-elle un amour si ardent, un amour sincere et qui ne cherchait rien d'autre qu'assurer son bonheur. Un leger parfum d'iris se degageait des vetements de drap grossier portes par Philippe. Il la bercait doucement, comme un tout petit enfant, et elle lui etait reconnaissante de ne pas tenter de caresses plus precises. Mais elle sentait son souffle dans ses cheveux et sur son cou, a travers l'epaisseur des nattes qui tombaient de chaque cote de sa tete. Les yeux clos, elle demanda doucement :
— Souffrez-vous encore, Monseigneur ?
— Cessez de m'appeler Monseigneur. Pour vous, je ne suis que Philippe.
Je veux oublier tout le reste. Quant a souffrir, non je ne souffre plus. Au contraire, je suis heureux... heureux comme je ne l'ai pas ete depuis longtemps. Vous etes la, je vous tiens dans mes bras et vous ne me jetez plus de paroles dures. Vous m'avez laisse vous parler et vous ne me repoussez plus. Catherine... ma belle, ma merveilleuse Catherine. !... Est-ce que... Est-ce que je peux esperer un baiser ?
Dans l'ombre, Catherine sourit. Le ton humble et presque enfantin qu'il employait la touchait plus qu'elle ne voulait l'admettre. Elle se souvenait de l'orgueilleux seigneur qui savait si bien agir, parler en maitre, qui l'avait tutoyee a premiere vue comme si elle lui appartenait deja. Ce soir, il n'etait plus qu'un homme passionnement epris...
Elle fit un tout petit geste qui mit sa bouche presque contre celle de Philippe.
— Embrassez-moi, dit-elle seulement, sans la moindre hesitation.
Tout etait simple soudain. Elle se souvenait, avec un certain plaisir, du baiser d'Arras et quand les levres de Philippe toucherent les siennes, elle poussa un leger soupir et ferma les yeux. Elle sentait, instinctivement, qu'avec cet homme a la fois froid et passionne, la joie d'amour etait une affaire sure. Il savait amener sa partenaire a l'oubli progressif des choses et des etres parce qu'il savait dominer ses impulsions. Son baiser etait d'une extraordinaire douceur, un chef-d'?uvre de patience et d'ardeur. En amour, il etait le maitre que toute femme attend inconsciemment et Catherine, tout de suite subjuguee, se laissa emporter sans resistance sur les vagues d'un ocean de plaisir et de caresses sous lesquelles elle ne tarda pas a defaillir. Car, la sentant enfin a sa merci, Philippe ne s'en tint pas au baiser si timidement demande. Et bientot, le vent leger qui traversait le bosquet entraina avec lui les soupirs et les tendres mots chuchotes pour en eparpiller le secret a la campagne endormie. Seul, le cheval du prince fut temoin de la victoire totale de son maitre.
Au moment ou Catherine connut la realite charnelle de l'amour, ses yeux s'ouvrirent demesurement sur la voute de branches encore feuillues qui s'entrelacaient au-dessus de sa tete. La lumiere argentee de la lune a son lever glissa au travers et montra a Catherine le visage grave et tendu de son amant. Il lui parut, a cet instant, d'une beaute surhumaine, mais elle ne sut pas que son propre visage etait illumine par la passion. Sous un baiser, Philippe etouffa le bref cri de douleur de la jeune femme, vite change en un long gemissement de plaisir.
Quand, enfin, ils se separerent, Philippe enfouit son visage dans la masse des cheveux soyeux qu'il couvrit de baisers fous. Passant ses mains sur ses joues, Catherine sentit qu'elles etaient mouillees de larmes :
— Tu pleures ?
— De bonheur, mon amour... et de reconnaissance. Je ne croyais pas que ce don de toi-meme serait aussi splendide, aussi complet... que je serais vraiment le premier...
Elle appuya sa main sur sa bouche pour lui imposer silence.
— Je t'ai dit que mon mari ne m'avait pas touchee. Qui voulais-tu ?
— Tu es si belle... Les tentations ont du etre nombreuses...
— Je sais me defendre, fit Catherine avec une moue si adorable qu'elle lui valut un nouveau baiser.
Puis, comme un rayon de lune eclairait maintenant en plein son corps devetu, Philippe alla chercher une couverture roulee au troussequin de sa selle et l'en enveloppa tout en l'enfermant a nouveau dans ses bras. Il se mit a rire.
- Предыдущая
- 19/112
- Следующая