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Contes merveilleux, Tome II - Andersen Hans Christian - Страница 8


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A l'oree de la foret, ou elle etait alors parvenue, s'etendait un grand champ de ble, mais le ble n'y etait plus depuis longtemps, seul le chaume sec et nu se dressait sur la terre gelee. C'etait pour elle comme une foret qu'elle parcourait. Oh! comme elle tremblait de froid. Elle arriva ainsi a la porte de la souris des champs. C'etait un petit trou au pied des fetus de paille. La souris avait la sa bonne demeure tiede, toute sa chambre pleine de grain, cuisine et salle a manger. La pauvre Poucette se placa contre la porte, comme toute pauvre mendiante, et demanda un petit morceau de grain d'orge, car depuis deux jours elle n'avait rien eu du tout a manger.

– Pauvre petite, dit la souris, car c'etait vraiment une bonne vieille souris des champs, entre dans ma chambre chaude manger avec moi!

Puis, comme Poucette lui plut, elle dit:

– Tu peux bien rester chez moi cet hiver, mais il faudra tenir ma chambre tout a fait propre et me conter des histoires, car je les aime beaucoup.

Et Poucette fit ce que demandait la bonne vieille souris, et vecut parfaitement.

– Nous aurons bientot une visite, dit la souris des champs, mon voisin a l'habitude de venir me voir tous les jours de la semaine. Il se tient enferme encore plus que moi, il a de grandes salles et il porte une delicieuse pelisse de velours noir; si tu pouvais l'avoir pour mari, tu n'aurais besoin de rien; mais il ne voit pas clair. Il faudra lui conter les plus belles histoires que tu saches.

Mais Poucette ne se souciait pas d'avoir le voisin, qui etait une taupe. Il vint rendre visite dans sa pelisse de velours noir. Il etait riche et instruit, dit la souris des champs, son appartement etait aussi vingt fois plus grand que celui de la souris, et il etait plein de science, mais il ne pouvait supporter le soleil et les belles fleurs, il en disait du mal, car il ne les avait jamais vues. Poucette dut chanter, et elle chanta «Hanneton, vole, vole «et «Le moine va aux champs», et la taupe devint amoureuse d'elle a cause de sa belle voix, mais ne dit rien, car c'etait une personne circonspecte.

Elle s'etait recemment construit un long corridor dans la terre, de sa demeure a celle de la souris, et elle permit a la souris et a Poucette de s'y promener tant qu'elles voudraient. Mais elle leur dit de ne pas avoir peur de l'oiseau mort qui gisait dans le corridor. C'etait un oiseau entier avec bec et plumes, qui surement etait mort depuis peu, au commencement de l'hiver, et avait ete enterre juste a l'endroit ou elle avait fait son corridor.

La taupe prit dans sa bouche un morceau de meche, car cela brille comme du feu dans l'obscurite, et elle marcha devant eux et les eclaira dans le long couloir sombre; lorsqu'ils arriverent a l'endroit ou gisait l'oiseau mort, la taupe dresse en l'air son large nez et heurta le plafond, et cela fit un grand trou par lequel la lumiere put briller. Sur le sol gisait une hirondelle morte, ses jolies ailes plaquees contre son corps, les pattes et la tete cachees sous les plumes. Le pauvre oiseau etait evidemment mort de froid. Poucette en eut de la peine, elle aimait tant tous les petits oiseaux, qui avaient si joliment chante et gazouille pour elle tout l'ete, mais la taupe donna un coup de ses courtes pattes a l'hirondelle, et dit:

– Elle ne piaillera plus! ca doit etre lamentable de naitre petit oiseau. Dieu merci, aucun de mes enfants ne sera ainsi, un oiseau pareil n'a rien d'autre pour lui que son qvivit, et doit mourir de faim l'hiver!

– Oui, vous pouvez le dire, vous qui etes prevoyant, dit la souris. Qu'a l'oiseau pour tout son qvivit, quand vient l'hiver? Il doit avoir faim et geler; mais ce qvivit est tout de meme une grande chose!

Poucette ne dit rien, mais lorsque les deux autres eurent tourne le dos a l'oiseau, elle se baissa, ecarta les plumes qui recouvraient la tete de l'hirondelle, et la baisa sur ses yeux clos.»C'est peut-etre celle qui a si joliment chante pour moi cet ete, se dit-elle, quelle joie il m'a procuree, le bel oiseau!»

Puis la taupe boucha le trou par ou le jour luisait, et les dames l'accompagnerent a sa demeure. Mais la nuit, Poucette ne put dormir, elle se leva de son lit et tressa une belle couverture de paille dont elle alla envelopper l'oiseau mort, et elle mit du coton moelleux, qu'elle avait trouve chez la taupe, autour du corps de l'oiseau, afin qu'il put etre au chaud dans la terre froide.

– Adieu, beau petit oiseau, dit-elle. Adieu, et merci pour tes delicieux chants de cet ete, lorsque tous les arbres etaient verts et que le soleil brillait si chaud au-dessus de nous!

Et elle posa sa tete sur la poitrine de l'oiseau, mais fut aussitot tres effrayee, car il y avait comme des battements a l'interieur. C'etait le coeur de l'oiseau. L'oiseau n'etait pas mort, il etait engourdi, et la chaleur l'avait reanime.

A l'automne toutes les hirondelles s'envolent vers les pays chauds, mais il en est qui s'attardent, et elles ont tellement froid qu'elles tombent comme mortes, elles restent ou elles sont tombees, et la froide neige les recouvre.

Poucette etait toute tremblante de frayeur, car l'oiseau etait fort grand, a cote d'elle qui n'avait qu'un pouce, mais elle rassembla son courage, pressa davantage le coton autour de la pauvre hirondelle, et alla chercher une feuille de menthe crepue, qu'elle avait eue elle-meme comme couverture, et la passa sur la tete de l'oiseau.

La nuit suivante elle se glissa de nouveau vers lui, et il etait alors tout a fait vivant, mais tres faible; il ne put ouvrir qu'un instant ses yeux et voir Poucette, qui etait la, un morceau de meche a la main, car elle n'avait pas d'autre lumiere.

– Sois remerciee, gentille enfant lui dit l'hirondelle malade, j'ai ete delicieusement rechauffe, bientot j'aurais repris des forces et de nouveau je pourrai voler aux chauds rayons du soleil!

– Oh! dit Poucette, il fait froid dehors, il neige et il gele, reste dans ton lit chaud, je te soignerai.

Elle apporta de l'eau dans un petale de fleur a l'hirondelle, qui but et raconta comment elle s'etait blessee l'aile a une ronce, et n'avait pas pu voler aussi vite que les autres hirondelles, qui etaient parties loin, tres loin, vers les pays chauds. Elle avait fini par tomber a terre, ensuite elle ne se rappelait plus rien, et ne savait pas du tout comment elle etait venue la.

Tout l'hiver elle y restera, et Poucette fut bonne pour elle, et l'aima beaucoup; ni la taupe ni la souris des champs ne s'en douterent, car elles ne pouvaient sentir la pauvre malheureuse hirondelle.

Des que vint le printemps et que le soleil rechauffa la terre, l'hirondelle dit adieu a Poucette, qui ouvrit le trou fait par la taupe au-dessus. Le soleil rayonnait superbe au-dessus d'elles, et l'hirondelle demanda a Poucette si elle ne voulait pas venir avec elle, car elle pourrait se mettre sur son dos, elles s'envoleraient ensemble loin dans la foret verte. Mais Poucette savait que cela ferait de la peine a la vieille souris des champs, si elle la quittait ainsi.

– Non je ne peux pas, dit Poucette.

– Adieu, adieu, bonne et gentille fille, dit l'hirondelle en s'envolant au soleil.

Poucette la suivit des yeux, et ses yeux se mouillerent, car elle aimait beaucoup la pauvre hirondelle.

– Qvivit! qvivit! chanta l'oiseau.

Et il s'eloigna dans la foret verte.

Poucette etait triste. Elle n'eut pas la permission de sortir au chaud soleil: le ble, qui etait seme sur le champ au-dessus de la maison de la souris, poussa d'ailleurs haut en l'air, c'etait une foret drue pour la pauvre petite fille qui n'avait qu'un pouce.

– Cet ete tu vas coudre ton costume, lui dit la souris, car sa voisine, l'ennuyeuse taupe a la pelisse de velours noir, l'avait demande en mariage. Tu n'auras de la laine et du linge. Tu auras de quoi t'asseoir et te coucher, quand tu seras la femme de la taupe!

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