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Aventures Et Mesaventures Du Baron De Munchhausen - Burger Gottfried August - Страница 14


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Cette operation terminee, je transportai tous les affuts et tous les caissons au milieu du camp, et, de peur que le roulement des roues ne reveillat les gens, je les pris deux a deux sous les bras. Cela faisait un beau tas, aussi eleve pour le moins que les rochers de Gibraltar. Je saisis alors un fragment d’une piece de fer de quarante-huit, et me procurai du feu en le frappant contre un pan de mur, reste d’une construction mauresque, et qui etait enterre de vingt pieds au moins: j’allumai une meche et mis le feu au tas. J’oubliais de vous dire que j’avais jete sur le sommet toutes les munitions de guerre.

Comme j’avais soin de placer dans le bas les matieres les plus combustibles, la flamme s’elanca bientot haute et eclatante. Pour ecarter de moi tout soupcon, je fus le premier a donner l’alarme. Comme vous pouvez le penser, le camp se trouva saisi d’epouvante; on supposa, pour expliquer ce desastre, que les gens de la forteresse avaient fait une sortie, tue les sentinelles, et etaient parvenus a detruire l’artillerie.

M. Drinkwater, dans la relation qu’il a faite de ce siege celebre, parle bien d’une grande perte eprouvee par l’ennemi a la suite d’un incendie, mais il n’a pas su a quoi en attribuer la cause: cela, du reste, ne lui etait guere possible, car – bien que j’aie, a moi tout seul, dans cette nuit, sauve Gibraltar – je n’ai mis personne dans ma confidence, pas meme le general Elliot. Le comte d’Artois, pris d’une panique, s’enfuit avec tous ses gens, et, sans s’arreter en route, arriva d’une traite a Paris. La terreur que leur avait inspiree ce desastre fut telle, qu’ils ne purent manger de trois mois, et vecurent simplement de l’air du temps, a la facon des cameleons.

Environ deux mois apres que j’eus rendu cet eclatant service aux assieges, je me trouvais a dejeuner avec le general Elliot, quand tout a coup une bombe – je n’avais pas eu le temps d’envoyer les mortiers de l’ennemi rejoindre ses canons – penetra dans la chambre et tomba sur la table. Le general fit ce qu’aurait fait tout le monde en pareil cas, il sortit immediatement de la salle. Moi, je saisis la bombe avant qu’elle n’eclatat, et la portai au sommet du rocher. De cet observatoire j’apercus sur une falaise, non loin du camp ennemi, un grand rassemblement de gens; mais je ne pouvais distinguer a l’?il nu ce qu’ils faisaient. Je pris mon telescope, et je reconnus que c’etait l’ennemi qui, ayant arrete deux des notres, un general et un colonel avec lesquels j’avais dine la veille, et qui s’etaient introduits le soir dans le camp des assiegeants, s’appretait a les pendre en qualite d’espions.

La distance etait trop grande pour qu’il fut possible de lancer avec succes la bombe a la main. Heureusement je me souvins que j’avais dans ma poche la fronde dont David se servit si avantageusement contre Goliath. J’y placai ma bombe et la projetai au milieu du rassemblement. En touchant terre, elle eclata, et tua tous les assistants, a l’exception des deux officiers anglais, qui, pour leur bonheur, etaient deja pendus: un eclat sauta contre le pied de la potence et la fit tomber.

Nos deux amis, des qu’ils se sentirent sur la terre ferme, chercherent a s’expliquer ce singulier evenement; et voyant les gardes, les bourreaux et toute l’assistance occupes a mourir, ils se debarrasserent reciproquement de l’incommode cravate qui leur serrait le col, coururent au rivage, sauterent dans une barque espagnole, et se firent conduire a nos vaisseaux par les deux bateliers qui s’y trouvaient.

Quelques minutes apres, comme j’etais en train de raconter le fait au general Elliot, ils arriverent, et, apres un cordial echange de remerciements et d’explications, nous celebrames cette journee memorable le plus gaiement du monde.

Vous desirez tous, messieurs, je le lis dans vos yeux, savoir comment je possede un tresor aussi precieux que la fronde dont je viens de vous parler. Eh bien! je vais vous le dire. Je descends, vous ne l’ignorez sans doute pas, de la femme d’Urie, qui eut, comme vous savez, des relations tres intimes avec David. Mais avec le temps – cela se voit souvent – Sa Majeste se refroidit singulierement a l’endroit de la comtesse, car elle avait recu ce titre trois mois apres la mort de son mari. Un jour ils se prirent de querelle au sujet d’une question de la plus haute importance, qui etait de savoir dans quelle contree fut construite l’Arche de Noe et a quel endroit elle s’etait arretee apres le Deluge. Mon aieul avait la pretention de passer pour un grand antiquaire, et la comtesse etait presidente d’une societe historique: lui, avait cette faiblesse commune a la plupart des grands et a tous les petits, de ne pas souffrir la contradiction, et elle, ce defaut, special a son sexe, de vouloir avoir raison en toute chose; bref, une separation s’ensuivit.

Elle l’avait souvent entendu parler de cette fronde comme d’un objet des plus precieux, et trouva bon de l’emporter, sous pretexte de garder un souvenir de lui. Mais, avant que mon aieule eut franchi la frontiere, on s’apercut de la disparition de la fronde, et on lanca six hommes de la garde du roi pour la reprendre. La comtesse poursuivie se servit si bien de cet objet qu’elle atteignit un de ces soldats qui, plus zele que les autres, s’etait avance en tete de ses compagnons, precisement a la place ou Goliath avait ete frappe par David. Les gardes, voyant leur camarade tomber mort, delibererent murement et penserent que ce qu’il y avait de mieux a faire, c’etait d’en referer au roi: la comtesse, de son cote, jugea prudent de continuer son voyage vers l’Egypte, ou elle comptait de nombreux amis a la cour.

J’aurais du vous dire d’abord que de plusieurs enfants qu’elle avait eus de Sa Majeste, elle avait emmene dans son exil un fils, son fils bien-aime. La fertilite de l’Egypte ayant donne a ce fils plusieurs freres et s?urs, la comtesse lui laissa par un article particulier de son testament la fameuse fronde; et c’est de lui qu’elle m’est venue en ligne directe.

Mon arriere-arriere-grand-pere, qui possedait cette fronde, et qui vivait il y a environ deux cent cinquante ans, fit, dans un voyage en Angleterre, la connaissance d’un poete qui n’etait rien moins que plagiaire, et n’en etait que d’autant plus incorrigible braconnier; il s’appelait Shakespeare. Ce poete, sur les terres duquel, par droit de reciprocite sans doute, les Anglais et les Allemands braconnent aujourd’hui impudemment, emprunta maintes fois cette fronde a mon pere et tua, au moyen de cette arme, tant de gibier a Sir Thomas Lucy, qu’il faillit encourir le sort de mes deux amis de Gibraltar. Le pauvre homme fut jete en prison, et mon aieul lui fit rendre la liberte par un procede tout particulier.

La reine Elisabeth, qui regnait alors, etait devenue vers la fin de sa vie a charge a elle-meme. S’habiller, se deshabiller, manger, boire, accomplir enfin maintes autres fonctions que je n’enumerai point, lui rendaient la vie insupportable. Mon aieul la mit en etat de faire tout cela selon son caprice, par elle-meme ou par procuration. Et que pensez-vous que demanda mon pere en recompense de ce signale service, – la liberte de Shakespeare. La reine ne put lui rien faire accepter de plus. Cet excellent homme avait pris le poete en telle affection, qu’il eut volontiers donne une partie de sa vie pour prolonger celle de son ami.

Du reste, je puis vous assurer, messieurs, que la methode pratiquee par la reine Elisabeth, de vivre sans nourriture, n’obtint aucun succes aupres de ses sujets, au moins aupres de ces gourmands affames auxquels on a donne le nom de mangeurs de b?uf. Elle-meme n’y resista pas plus de sept ans et demi, au bout desquels elle mourut d’inanition.

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